Annadjib Ramadane

Tchadiens, devenez des community manager

Selon l’état des lieux d’internet et des réseaux sociaux dans la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale, la zone Cemac, le Tchad compte près de 360 000 utilisateurs d’internet et près de 200 000 utilisateurs actifs sur les réseaux sociaux, donc principalement sur Facebook.

Près de 200 000 utilisateurs actifs par rapport aux 11 millions d’habitants, c’est un pourcentage de près de 2 pour 100, c’est très peu si l’on compare avec les pays de la sous région.

Ce faible pourcentage s’explique par le fait qu’Internet est chez nous un luxe et son potentiel est inexploité voire méconnu. Bien que la communauté tchadienne sur internet est minime, elle s’illustre négativement avec une véhiculation de haine, insultes, bref un chaos total. Les pages Facebook qui font la promotion de la culture  du tourisme tchadien sont rares mais d’autres parfois s’illustrent aussi négativement en y mêlant un activisme politique qui ne dit pas son nom.

Alors parmis les nouveaux métiers en vogue du web, je propose aux tchadiens de devenir des Community Manager car c’est presque à portée de tous.

C’est quoi un community manager?

Le Community manager ou Animateur de communauté est un métier qui est apparu récemment avec le développement des réseaux sociaux.

Pour faire simple le Community manager a pour mission de gérer, fédérer, animer, fidéliser une communauté de fans pour le compte d’une célébrité, d’une entreprise, d’une marque, d’une institution ou même de personnalité politiques.

Le rôle d’un community manager ne se résume pas à seulement répondre aux commentaires, il doit fidéliser la communauté, faire preuve de créativité et surfer sur les tendances et bien évidemment avoir une maitrise du sujet.

Un domaine encore méconnu au Tchad.

À vrai dire, beaucoup n’ont jamais entendu parlé de community manager. Bien que la culture des réseaux sociaux soit de plus en plus présente au Tchad, beaucoup de célébrités, artistes et hommes politiques n’ont toujours pas de pages Facebook ou de comptes Twitter, même s’ils en possèdent, ils restent inactifs.

Combien de talentueux musiciens, peintres, comédiens tchadiens ont sombré dans l’anonymat national et international juste parce qu’ils avaient un défaut de communication sur les réseaux sociaux?

Combien d’institutions tchadiennes et de comptes officiels sont sur Twitter?

Un community manager efficace veillera à rassembler et fidéliser la communauté autour de l’artiste en faisant preuve de créativité et pourra même générer un Buzz positif autour d’un événement donné.

Là où nos institutions, politiques et députés sont accusé d’inertie, le community manager se fera leur porte parole, il fera un compte rendu quotidien de leurs déplacements et activités,bien évidemment avec leur accord.

Le domaine est encore méconnu mais au Tchad certains ont déjà son monopole car beaucoup ne savent pas comment on le devient.

Comment devenir community manager ?

Des écoles pour devenir community manager sont quasiment inexistantes en Afrique, cependant dans certains pays, des regroupements de community manager existent et organisent des formations. Pour un pays comme le Tchad où rien de tout ça n’existe, il suffit de s’autoformer, lire beaucoup les avis des professionnels du domaine car les sites webs de community managers ne manquent pas. Comme compétence, faudrait avoir une bonne connaissance des réseaux sociaux, du web et surtout avoir de bonnes notions en communication et relations humaines.

S’imposer et se faire reconnaître comme community manager est certes difficile dans l’environnement tchadien, mais à cœur vaillant, rien d’impossible.

Annadjib


Tchad : quand le prix d’Internet est un handicap

Début décembre, la censure du net à été levée au Tchad, ce qui veut dire que plus besoin d’utiliser certaines applications pour contourner la censure et accéder à des réseaux sociaux et autres sites jugés « peu recommandables » par le gouvernement.

Très tôt, des réjouissances et même un communiqué dans lequel on affirme que la censure pendant 235 jours a coûté près de 18 millions d’euros à l’économie tchadienne, on sait pas comment ils en sont arrivés pour trouver ce chiffre mais bon, c’est le Brookings institute qui le dit…

Ce qu’il faut comprendre c’est qu’avec ou sans censure on sait pas vraiment à quoi servent les taxes sur les opérateurs téléphoniques à part saigner à blanc les pauvres consommateurs.

Je ne connais pas le prix des forfaits internets dans tout les pays de la sous région, mais comparé au Cameroun voisin les forfaits tchadien sont au minimum 10 fois plus chers. Ainsi avec ou sans censure le coût élevé d’Internet est un sérieux handicap.

On a une très mauvaise expérience du web.

Que peut-on faire avec le forfait 20 MB à 500 fcfa, soit près de 0,90 euros ? Rien, si on utilise un PC ou même des navigateurs comme Chrome sur Smartphone le forfait fait rarement plus de 10 minutes. Alors on utilise les anciennes versions du navigateur mobile Opéra mini et on désactive les images pour profiter le plus longtemps possible de nos maigres forfaits. Cette utilisation d’Internet n’est pas vraiment conviviale, on a difficilement accès à certains sites de plus en plus friands de Cookies, et on préfère passer le temps sur des réseaux sociaux et non profiter réellement du web.

On ne peut s’auto former.

Mooc



Vous connaissez les M.O.O.C cet acronyme anglais utilisé pour désigner les différents cours qu’on peut faire à distance, ici c’est pratiquement impossible sauf si l’on veut se ruiner (les cours sont parfois gratuit, internet non), les vidéos didactiques, les tutoriels sont à la fois si proches et si éloignés de nous. Avant d’ouvrir une vidéo YouTube ou télécharger un document on compare d’abord sa taille avec notre forfait.

Pas de contenu approprié.

Parfois à des fins académiques je fouille un peu partout le web, et le constat c’est que plus de 2/3 du contenu internet ayant lien avec le Tchad est rédigé par des sites étrangers et surtout pas d’OpenData concernant le pays.

Open-data Ue

C’est ainsi que pour moi l’un des défis principaux pour les blogueurs et acteurs web tchadien c’est d’oeuvrer pour avoir un contenu de qualité au pays.

En attendant on essaie de se mobiliser, mais je vous cache pas qu’on est inefficace car c’est pas une priorité pour tous les internautes.

Annadjib


Quid de la seconde édition de la semaine numérique au Tchad ?

Le 27 novembre 2014 s’était déroulée la première semaine numérique au Tchad à l’initiative de Wenak labs et de l’atelier des médias de Rfi .

Ateliers, formations et réflexions autour du numérique ont animés la première édition de la semaine du numérique qui avait pour thème : Les Tic au service du développement.
Cette année la seconde édition de la semaine du numérique s’est déroulée du 14 au 17 décembre, organisée par WenakLabs en partenariat avec l’Institut Français au Tchad qui a abrité dans ses locaux, les différentes activités.

Cette seconde édition a été plus riche que l’ancienne, notamment en termes de visites, d’ateliers (qui étaient au nombre de 3) et de participants.

On a eu :

L’atelier réseaux sociaux et artistes 

Un atelier sur Comment effectuer sa veille journalistique sur internet ? Animé par Mamadou Djimtebaye, Directeur de Tchadinfos

Et enfin l’atelier Jerryclan sur la construction en commun d’un ordinateur à partir de matériaux recyclés et la présentation de la cartographie numérique.

Déplacement des composantes. Crédit photo : WenakLabs
Des lycéens vraiment motivés. Credit photo : WenakLabs
Pose de la carte mère dans le Jerry. Credit photo : WenakLabs
Presentation de la Cartographie numerique, #OpenstreetMap. Crédit photo : @abdallah_td

La semaine du numérique s’est clôturée le samedi par un Barcamp et le lancement de la seconde session de l’heure du net.Un BarCamp est une rencontre, une non-conférence ouverte, qui prend la forme d’ateliers-événements participatifs où le contenu est fourni par des participants qui doivent tous, à un titre ou à un autre, apporter quelque chose au Barcamp. C’est le principe « pas de spectateur », « tous participants ». Le barcamp a rassemblé beaucoup d’acteurs du numérique tchadien dont l’équipe d’Isoc Chad qui est intervenue au sujet du contenu tchadien sur internet, de création de sites web avec notre nom de domaine… Une intervention pleine d’anecdotes.

 

 

Le coordonnateur du Reseau des Jeunes pour le Développement
et le Leadership
 nous a parlé de l’opportunité de l’internet pour la jeunesse tchadienne.

 

J’ai également eu l’occasion de parler de blog, réseaux sociaux avec Abdallah et Salim .

 

 

Toujours dans les réseaux sociaux, Chérif nous a parlé de son amour pour Twitter qu’il considère comme une drogue.

 

On a clôturé le Barcamp par le lancement de la campagne Un Hashtag pour le Tchad.

Crédit photo : @fortius0

La journée s’est terminée avec le lancement de la seconde saison de L’heure du net qui est un rendez-vous bimensuel ayant pour objectif de sensibiliser les jeunes tchadiens à Internet et aux réseaux sociaux. On a assisté à la présentation du Massiv open (off)line course (MOOC BOX) , un boîtier qui contient des cours. Pas besoin d’internet pour l’utiliser. Selon Bouchra de TECHNIDEV « la MOOC BOX cible les élèves, les étudiants, les professionnels, les enseignants et les parents, il est déjà disponible à l’Institut Français.

La semaine a été enrichissante, beaucoup de discussions qui m’ont imprégnées des difficultés et enjeux du numérique tchadien.

J’ai surtout eu l’occasion de rencontrer beaucoup de monde, mes vieux amis de Twitter, des journalistes, des concepteurs d’applications et des Youtubeurs.
Vivement la prochaine semaine numérique.

Annadjib


Ma semaine à Abéché

J’ai effectué une visite de courtoisie à Abéché, histoire de revoir ma famille et de m’occuper de certaines affaires plus ou moins importants. Abéché est la 4ème ville du Tchad en termes de population et la 3ème d’un point de vue économique. Depuis la fin de mon séjour universitaire, je savais bien que mon histoire avec cette ville n’était pas prête de se terminer. Abéché est à 900 km de N’Djaména, la capitale. Après une journée entière passée dans le bus, certaines choses m’ont frappé dès que j’ai posé mes pieds sur le sol.

Presque rien n’a changé

Il y a peu de différence entre Abéché et la ville que j’ai quitté, il y a déjà 18 mois : le même bitume impeccable, le même paysage, les rues qui se vident des 20 heures, les mêmes problèmes d’eau, d’électricité et, malheureusement, le même chômage qui affecte les jeunes de la ville.

Abéché a beau s’afficher comme la 3ème économie du pays, elle dépend essentiellement du commerce. L’artisanat y est présent mais ne génère pas beaucoup d’emplois. Les jeunes se débrouillent ici et là ou ils attendent simplement autour d’un carrefour leur intégration à la fonction publique.

La nouvelle Banque des États de l'Afrique centrale d'Abéché qui attend son inauguration
La nouvelle Banque des États de l’Afrique centrale d’Abéché, qui attend son inauguration

Mais entre chômage, crise et ennui, les jeunes s’occupent.

 

Les après-midi pétanque

La pétanque (ou « jeu de boule ») est l’un des sports les plus en vogues à Abéché.

Après midi pétanque

 

Dès 16 heures, étudiants, lycéens, militaires, cadres, et même quelques curieux, s’attroupent près de certains terrains de foot de la ville. Des équipes se forment et on assiste à des parties plus ou moins professionnelles, qui se terminent parfois par des disputes semblables à celles des confréries religieuses de la ville.

 

Des tensions religieuses

Du XVIIe siècle jusqu’au début du XXe siècle, Abéché a été la capitale du royaume du Ouaddaï, l’un des premiers royaumes à avoir embrassé l’islam, propagé à l’époque par les arabes venus du nord de l’Afrique. Les anciens d’Abéché ne jurent que par l’islamisme, le « vrai ».

Alors, dans une époque où naissent de plus en plus de confréries musulmanes (le prophète pbsl l’avait prédit), il est difficile de s’y retrouver et d’identifier le « vrai » islam. Les principales confréries à Abéché sont :

Les wahhabites : ils sont conservateurs et très rigoureux dans la pratique religieuse. Ils aiment arborer de très longues barbes. Certains aiment se moquer d’eux en disant qu’ils sont sponsorisés par le Qatar et l’Arabie Saoudite, parce qu’ils détiennent les plus belles mosquées.

Les tidjanites : ils forment la majorité et ont une profonde aversion pour les wahhabites, qu’ils considèrent comme des égarés.

Les tensions entre les deux écoles ont été exacerbées à l’occasion de la célébration de la naissance du prophète pbsl. Celle-ci fait polémique : les wahhabites affirment que c’est une innovation donc elle doit être interdite, tandis que les tidjanites en font toute une fête. La ville s’endort et se réveille sous les nasheeds* propagés par les hauts parleurs des mosquées tidjanites de la ville. Une fois, un vieux a débarqué dans une mosquée wahhabite pour reprocher à son fils de fréquenter les « égarés », la police a du intervenir pour calmer la situation.
Espérons qu’ils n’en viennent pas aux mains comme les paysans.

 

Des conflits ruraux

Les conflits ruraux sont monnaie courante, il y a quelques jours, des paysans se sont entretués pour des histoires de terres et de bétails, la situation a failli devenir une guerre inter-ethnique. L’armée a du intervenir pour calmer tout ce beau monde.

Entre les conflits religieux et ruraux, il y a un point sur lequel tout le monde est d’accord.

 

De plus en plus de célibataires.

À Abéché, il y a environ 5 fois plus de femmes que d’hommes. Pourtant, le taux de célibataires n’a jamais été aussi élevé, alors que dans la région rien n’est plus facile que se marier.

Le chômage, la crise et la dot dissuadent les célibataires.

Les temps sont durs, alors rassembler la dot devient de plus en plus difficile. C’est ainsi que, dans un quartier de la ville, des hommes et femmes soucieux de l’avenir de leurs enfants ont décidé de « solder » les mariages. La dot, qui était au minimum de 500 000 FCFA et quelques grammes d’or, est passée à 250 000 FCFA et 1 gramme d’or, 10 personnes ont été déjà été sauvées du célibat.

Les prétendants sont tellement rares que les femmes ne se préoccupent plus de savoir s’il sont polygames ou non, c’est mariage ou rien. En parlant de mariage, il y a 3 ans, en plaisantant j’avais dit à une fille que je l’épouserais. Dès mon arrivée, ses sœurs ont commencé à m’appeler « beau frère », sa mère m’a dit que j’étais quelqu’un de bien. J’ai du m’éclipser. Bref, chacun pour soi, mariage pour tous !
Nasheed : chant religieux islamique.

Annadjib


De la nécessité d’un mot clé pour Twitter Tchad 

Rares sont les tchadiens présents sur Twitter. Je n’ai pas les chiffres exacts, mais comparé à la communauté Facebook, on est approximativement 1000 fois moins. Mais « Être peu n’exclut pas l’union ».

Pour les tchadiens le réseau social par excellence, c’est Facebook, car il est facile de créer un compte. On peut y ajouter n’importe qui et même sans rien lire ni écrire, on peut s’y épanouir en passant la journée à liker des images.

Ce qui n’est pas vraiment le cas de Twitter qui est un site de microblogging dans lequel ce sont plutôt les informations qui ont de l’importance.

C’est pour ça que la majorité des nouveaux arrivants tchadiens sur Twitter disparaissent quelques instants après la création de leur compte. Car Twitter, sur navigateur mobile ce n’est pas très convivial : sur la timeline on ne voit pas assez d’images, du coup on se sent perdu.

À part les comptes Twitter éphémères, beaucoup comprennent finalement son fonctionnement et viennent grossir nos rangs squelettiques.

Alors j’ai remarqué que Twitter commence à avoir petit à petit de l’importance auprès des hommes politiques et intellectuels tchadiens. Lors de l’élection présidentielle passée, on a vu l’apparition de plusieurs comptes personnels des opposants, ministres et quelques ténors du parti au pouvoir, il ne manquait plus que le compte officiel du Président de la République.

Cet intérêt pour twitter n’est pas fortuit

Twitter Tchad c’est l’un des moyens les plus rapides pour s’informer de la situation du pays, on y trouve plusieurs envoyés spéciaux, journalistes indépendants qui parfois sous couvert d’anonymat se lâchent totalement.

Sur Twitter les discussions sur le Tchad sont d’un niveau un peu plus supérieur à celles que l’on peut trouver sur Facebook car la majorité des utilisateurs sont des journalistes, analystes politiques, activistes, étudiants… Le nombre de troll est nettement inférieur à celui de Facebook.

Alors, il faudrait un mot clé spécial pour twitter Tchad

A l’exemple de Kebetu au Sénégal et Kibaro en Guinée Conakry, un mot clé spécial pour la twittosphere tchadienne arrangerait beaucoup de choses :

On aurait plus facilement accès au contenu ayant un rapport avec le Tchad.

Bien que twitter soit riche en contenu sur le Tchad, les trouver tous est une chose difficile. Les francophones utilisent le hashtag Tchad et les anglophones Chad.  Pour bien être informés, il faudrait effectuer des recherches sur les 2 hashtags et même essayer « tchadien » « tchadienne » quand on s’y connait un peu. Ce qui est fort lassant.

Un mot clé unique réglerait définitivement ce problème.

On aurait plus d’impact.

Un mot clé spécial nous permettrait d’accroître notre impact dans la Twittosphère et de mobiliser plus de personne jusqu’à être en top des tendances dans notre région.

On serait pris au serieux.

Il n’est pas rare que je vois parfois un tweet dans lequel on se demande s’il existe même des tchadiens sur twitter. Même si on est peu, rien ne nous empêche de nous faire connaître. En attendant on est insignifiants, voire méprisés, jusqu’aujourd’hui il n’y à aucun compte twitter tchadien certifié car la plateforme estime que nous n’avons que peu d’impact.

Alors comment faire pour trouver un mot clé associé au Tchad ?

Ça n’a pas l’air vraiment compliqué, il faudrait se concerter, être d’accord puis sensibiliser les médias qui relaient les informations sur le Tchad. En attendant tout le monde fait semblant de ne pas s’en préoccuper.

Annadjib


Le Tchadien a peur de la femme

Au Tchad, une femme est forcément faible, soumise, une ménagère s’occupant tel un automate des affaires du foyer sans rechigner. Mais des que cette dernière ose, s’émancipe et commence à entreprendre, elle devient victime de railleries, jalousies et autres ragots comme on en connait chez nous. Le problème c’est que le tchadien basique, pour ne pas dire grossier, a, inscrit dans ses gènes le mépris de la femme. Ce mépris démesuré s’explique par plusieurs facteurs socio-culturels dont le plus important est la peur de la femme.

Le tchadien a peur d’une femme qui entreprend

Une femme au foyer, assez occupée par ses tâches quotidiennes ne pose pas de problème. Seul l’apport financier mâle est considéré comme l’essentiel dans la famille et est donc justificatif du pouvoir. Le jour où la femme fatiguée d’attendre sa pécule journalière décide de voler de ses propres ailes est cause d’une avalanche dans son foyer. Très tôt la femme devient victime de railleries, sarcasmes de mauvais goûts de la part de ceux ( même ses soeurs) à qui elle a parlé de ses projets. En général la femme après se déferlement de mauvaise foi de la part de son entourage abandonne, persuadée qu’elle n’est qu’une bonne à rien. Parfois malgré les obstacles elle ose, trébuche, se relève et quand elle sent déjà le succès, l’homme a peur qu’elle le rejete.

Le tchadien a peur de se faire rejeter par la femme

L’une des peurs du tchadien est de perdre le contrôle du foyer au profit de sa femme tant indépendante financièrement qu’intellectuellement. Chez nous au Tchad les foyers dans lesquels la femme travaille et a un patrimoine supérieur au mari sont minoritaires. On raconte qu’une femme indépendante devient invivable, arrogante, bref dangereuse. La vie du foyer ne tient plus qu’à un fil, disons qu’il ne tient plus qu’à l’humeur de la dame.

Imaginez un fonctionnaire victime d’arriérés de salaire, son épouse independante assumera les charges du foyer sans arrière pensée ( c’est son devoir se dira-t-elle) mais l’homme frustré se sentira comme émasculé, réduit a n’etre que l’ombre de lui même. Le comble serait qu’elle le quitte car il n’est plus qu’un figurant dans le couple.

Le tchadien a peur de la vengeance de la femme

La vie de la femme tchadienne n’est pas facile, elle est quotidiennement victime de mépris, que ce soit au boulot, dans la circulation, au marché. Chez nous on la traite de Mara Sakit qui veut dire « femme seulement », essayez de prononcer Mara Sakit  en y mettant tout votre mépris, toute votre haine et là vous imaginerez un peu ce que sentirait une femme qui se fait interpeler comme ça chaque jour.

En parlant de Mara Sakit, à l’époque ou je fréquentais les carrefours  une femme passa devant nous au volant de sa voiture et à l’intérieur y avait un homme avec elle, ce qui choquait le plus c’est qu’elle conduisait. Et voilà qu’un larron qui n’avait sûrement pas un pneu de vélo l’appartenant de dire : jamais je n’entrerai dans une voiture conduite par une Mara Sakit. 

Cette pensée résume le point de vue de beaucoup qui ne sont pas prêts à voir une femme les dépasser, et des qu’elle réussit on a peur de la voir devenir sans pitié envers ceux qui l’a méprisaient.

Quand je vois une supérieure hiérarchique très dure j’essaie de la comprendre et d’imaginer tout ce qu’elle a pu endurer.

Heureusement tout ça change petit à petit. Maintenant quand on voit une femme taximan, on l’a félicite et on attend le prochain taxi.

Annadjib


Madagascar et moi

Les saheliens de la mondo formation
Les saheliens de la mondo formation

J’ai eu la chance de participer à la formation Mondoblog qui a eu lieu à Madagascar, pays accueillant le XVIeme Sommet de la Francophonie couvert par de nombreux médias dont nos aînés via Antananarivo 2016 .

Chouette expérience, la formation s’est déroulée dans une ambiance festive, humour et anecdotes étaient de la partie.

Cette formation m’a permise de rencontrer des anciens et nouveaux de Mondoblog que je lisais régulièrement; j’ai remarqué qu’on ne peut cerner totalement un blogueur à travers ses écrits. Tel fut le cas quand j’ai croisé Innocent , je pensais avoir affaire à un blogueur toujours occupé à lire les actualités du jour, mais non, c’était un jeune comme un autre, drôle, simple, sympa.

J’ai eu aussi plusieurs discussions avec Aminata et Sandrine qui m’ont plusieurs fois fatigué avec leurs longs billets très techniques mais avant tout excellents.

Outre la formation, j’ai eu l’occasion de découvrir Madagascar, un pays qui n’est pas comme je le croyais, voilà pourquoi :

Madagascar, c’est pas MADAGASCAR. 

Vous connaissez presque tous le célèbre film d’animation Madagascar dans lequel Alex le lion, Marty le zèbre, Melman la girafe et Gloria l’ hippopotame s’échappent du Zoo de Central Park grace à quatre manchots (Commandant, Rico, Kowalski et Soldat) pour finir à Madagascar en compagnie de Lemuriens complètement dégénérés… Eh ben j’ai malheureusement appris que ce film d’animation n’était inspiré d’aucun fait réel, il n’ya aucun lion à Madagascar, même pas un bec de pingouin, juste des lemuriens.

Madagasar le film. Credit photo Archaic.fr
Madagasar le film. Credit photo Archaic.fr


À Madagascar les lemuriens ça cours pas les rues.



Madagascar c’est d’abord la terre sainte des lémuriens , du coup ils sont protégés car les braconniers et le réchauffement climatique sont un grand danger pour eux. Pour voir des lémuriens faut aller au Zoo ou dans des réserves naturelles, ça cour pas les rues comme les margouillats de chez nous.

À Madagascar il n’y a pas de ninjas.

Le peuple malgache est un peuple vraiment métissé, c’est un mélange d’asiatiques, d’hindous, d’européens … Je crois que c’est pour ça que les malgaches sont très jolies ( là n’est pas le problème) mais je croyais vraiment que le mélange avec l’Asie donnerait un peuple de « ninjas » mais au contraire les malgaches sont plutôt très gentils.

Les malgaches sont très gentils.

Durant mon séjour, j’ai pas vu un malgache fâché. Ils ont toujours le visage rayonnant comme celui de Rindra Hariniaina , toujours le sourire au lèvre comme l’aîné Rijaniaina Randrianomanana , c’est en ce sens que Attino disait : tu peux giffler un malgache, il va te dire merci. 

Les noms malgaches c’est pas des codes Wi-Fi.

Les noms malgaches nous étonnent toujours par leur longueur, qui n’est pas du tout fortuite. Tout nom malgache à un sens précis, ça peut être un voeux, une bénédiction. Donc avant de vous étonner de la longueur d’un nom malgache, chechez son sens et vous serez plutôt admiratifs.

J’aimerais continuer à vous décrire Tananarive mais les mots me manquent, la mélancolie m’envahit. Les images de ce séjour me reviennent toutirek*



Toutirek : un peu un peu, en langue Wolof.

Annadjib


Attachez le …

La société tchadienne, connue pour son amour des traditions et religions a toujours eu de sérieux problèmes pour gérer ses attardés,  fous et souffrant dépression. 

Cet état de fait s’explique par le fait que la prise en charge de personnes souffrantes d’aliénation mentale est presque inconnue chez nous. Les méthodes de prises en charge modernes sont quasiment inexistantes, pas de psychologues, psychiatres et encore moins d’asiles.

Cet absence de prise en charge adéquate coûte plus aux « malades » qu’aux familles.

Faut simplement avouer que notre société actuelle se sent encombrée par le poids de ses innombrables déficients mentaux, placés en marge de la société, on y va vraiment de main morte pour les gérer.

Prenons le cas d’une personne qui commence à souffrir de dépression, là où les soins modernes seraient les plus appropriés, on consultera simplement un guérisseur traditionnel et quelques marabouts, l’état du malade s’aggravant de jour en jour, les proches dépassés, on commencera à se demander quelles sont les causes de cette subite maladie.

Alors on a quelques causes universelles de folies…

1 – Un ensorcellement 

C’est la cause favorite pour expliquer les troubles mentaux, on se fatigue pas à chercher dans quel cas le malade a eu une altération de ses facultés mentales, même s’il est le seul rescapé d’un terrible accident on veut rien savoir, il a sûrement été ensorcelé par quelques jaloux de son emploi ou de ses diplômes ( quand il est chômeur). Si les remèdes cités ci haut ne marchent pas, on sort le grand jeux, on va voir les vrais marabouts et féticheurs, ceux qui détestent la civilisation mais aiment les billets tout neuf, ces mêmes qui juste un regard lancé, donnent un diagnostic et une facture qui font frissonner : – Il est possédé.

2 – Une possession par un esprit maléfique

Le pauvre souffrant de dépression, après avoir avalé diverses mixtures concoctées par les guérisseurs et marabouts se sent de plus en plus mal dans sa peau, une forte fièvre l’envahit, ses yeux jaunissent et fait de plus en plus de cauchemars, son corp ayant marre de servir de cobaye à des experiences farfelues. Les guérisseurs sont formels, cette subite aggravation de la maladie du patient est dû à l’esprit maléfique habitant le malade qui commence enfin à ressentir les effets des médicaments, Plus le malade est agité, plus son démon est puissant. Les jours passent et le démon refuse de quitter le corp tel un ministre refusant de démissionner.
Les guérisseurs refusant de reconnaitre leur charlatanisme diront simplement que c’est à cause de la drogue.

3 – La drogue

La drogue c’est l’excuse parfaite quand le malade est un jeune mal dans sa peau, c’est connu que la consommation de banga et autres substances favorise l’apparition des crises de folies. Ainsi le malade forcément drogué est une honte pour la famille, les marabouts et guérisseurs n’ont rien pu faire pour lui, il est condamné.

Heureusement dans leur maison y a un arbre, après courte concertation la famille décide d’utiliser sa derniere carte, l’enchaîner à un arbre pour le maitriser en attendant qu’un jour il retrouve ses esprits.

 

Le pauvre qui aurait pût être sauvé par quelques antidépresseurs termina attaché, plus victime de la folie de ses proches que de sa maladie.

Annadjib

 


Dur d’être un grand frère

C’est utile un grand frère, c’est ce que je me disais quand tout petit je rasais les murs à l’école pour éviter des embrouilles car j’avais personne pour me couvrir.
Un grand frère c’est d’abord une protection puis un exemple, c’est une lourde responsabilité.

Les responsabilités commencent très tôt, surtout quand à la sortie de la maison pour l’école, les parents te demandent de bien tenir les mains de tes petits frères et veiller sur eux.

On ne choisit pas de l’être, on assume simplement.

L’aîné doit être un exemple pour eux…

Dès qu’un aîné fait une gaffe, après les inévitables sermonts et reproches des parents on lui rappele toujours qu’il est l’aîné, qu’il doit donner l’exemple à ses petits frères et soeurs et pas être plus pire qu’eux.

Être aîné est synonyme d’avoir un comportement exemplaire, car d’habitude les cadets calquent la personnalite de l’aîné.

Parfois cette histoire de responsabilité précoce pèse sur l’aîné qui sacrifie une partie de sa « liberté » pour surveiller la plupart du temps les faits et gestes de ses petits quand il surveille pas les siens. Cet état de fait est parfois cause de frustration et de mauvaise humeur chez l’aîné.

L’aîné dépassé par la situation s’éloigne progressivement de ses petits sous le prétexte « qu’ils doivent le respecter »

Même quand on lui demande de l’aide pour les devoirs, il se contente de jeter un coup d’œil et dire : je sais pas, j’ai oublié, va relire tes cours…

L’aîné doit pas leur rendre la vie dure…

L’aîné éloigné et complexé devient quasiment invivable pour ses cadets, son devoir de protection devient un devoir de conservation, il surveille leurs moindres faits et gestes, il leur interdit parfois de sortir jouer avec des amis, il les accable de corvées et parfois les bats.

Au fur et à mesure les relations se dégradent, les petits en grandissants haissent de plus en plus leur aîné, haine qui persistera parfois toute leur vie.

Plus pire encore est la situation quand on voit un aîné surveiller à l’excès sa petite soeur à la fleur de l’âge, les : Où va tu? T’étais où ?  Qui vient de t’appeler ?  Sont quotidiens, habituel est devenu de voir un aîné frappé sa soeur au prétexte qu’elle n’a « aucune éducation »

C’est ainsi qu’on voit de plus en plus de mauvais grands frères car eux mêmes ont eu un « mauvais » grands frère.

Annadjib


Ode à la poussière

Ces feuilles qui frémissent

Ces dents qui grincent

Ces cheveux qui jaunissent

Ces yeux qui rougissent.

Ces turbans et voiles qu’on porte

Ce brouillard qui nous enveloppe

Ces papiers que le vent emporte

Cette envie de tomber en syncope…

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Comme vous l’avez deviné L’Harmattan est arrivé sans prévenir, entouré de son fidèle serviteur, la poussiere.

Très tôt dehors, le vent ne cesse de loger dans nos bouches, yeux et oreilles une fine poussière. Ce qui, accompagné de notre fameuse chaleur rend la journée vraiment longue.

Très longue sont les journées pour ceux qui n’ayant aucune activité en ces temps de crises et grèves préfèrent s’isoler pour éviter d’énerver ou se faire énerver par les proches. Car c’est connu, la poussière à force de nous agacer, nous rend grincheux et nous plonge dans un assourdissant silence.

Les coins autrefois animés jours et nuit dans le quartier se vident, nos longues nuits sont enveloppées d’un silence qui est parfois troublé par le cinéma voisin ou par l’aboiement lointain d’un chien errant.

Nos légions de moustiques disparaissent subitement laissant la place aux grillons et quelques sauterelles.

Seul les lézards semblent heureux car même le chat, leur ennemi juré n’est pas d’humeur à sortir les pourchasser.

Nos lèvres et gorges s’assèchent, toux et rhumes sont généreusement distribués par la poussière.
Pommades et crèmes autrefois délaissées deviennent nos fidèles compagnants.

Au loin on peut voir nos aînés, qui, autrefois nous devisagaient à cause de nos lunettes, en porter car c’est devenu un « mal nécessaire »

N’djaména métamorphosée et plongée dans une sorte de longue méditation grâce à la poussière.

Annadjib